Varsovie Musée Frédéric ChopinL’année 2010 a été désignée année Chopin 2010 marquant ainsi le bicentenaire de la naissance du pianiste compositeur. Cette année-là le Musée Fryderyk Chopin a été inauguré.

La richesse et la diversité de l’œuvre du musicien a été mise en lumière dans le monde entier, particulièrement en France et a été considéré comme un grand événement international par le gouvernement polonais. Concerts, publications, événements audiovisuels, expositions et colloques ont marqué cette importante célébration..

Emblème d’une culture partagée
En lançant cette l’année consacrée au grand musicien polonais, Frédéric Mitterrand, alors ministre de la Culture et de la Communication, soulignait que « si Chopin occupe cette place spéciale dans le cœur de chacun d’entre nous, c’est parce que ce poète insurpassable du piano, virtuose inspiré et génial improvisateur, sait confier à son instrument ses sentiments à la fois les plus intimes et les plus universels, ce qui est l’image même d’un dialogue confiant . (…) qui nous invite à conjuguer plus intimement encore les cultures et les sensibilités de nos deux pays – la Pologne et la France – et de transcender les différences et les frontières culturelles ».

Varsovie Musée Fryderyk Chopin entrée carte Pologne Varsovie Musée Fryderyk Chopin salle avec écoute de musique Varsovie Musée Fryderyk Chopin salle souterraine présentation oeuvres

Œuvre enracinée dans la culture polonaise
Si c’est en France que Frédéric Chopin a conçu et créé une part majeure de son œuvre, il est considéré comme l’un des grands génies polonais.
Exilé en France à 20 ans, sans jamais renier son identité, il a exprimé à travers son œuvre la nostalgie de sa terre natale placée sous le joug russe. Empreint au Zàl particulier qu’on entend au moindre détour de ses œuvres, et que l’on traduit par « nostalgie ». Scherzos, valses, nocturnes, mazurkas ou polonaises… Ses compositions intimistes sont imprégnées d’un attachement aux mélodies populaires de son enfance et d’un sentiment tragique de l’histoire. Car la Pologne a connu bien des vicissitudes : rayée de la carte suite aux partages du pays entre la Prusse,
l’Autriche et la Russie entre 1795 et 1918, puis dès 1830, lors de l’occupation russe, fermeture de l’université de Varsovie, du Conservatoire,
pillage des collections des musées et des bibliothèques…

Visuels ci-dessus / dessous : carte et histoire de la Pologne, installations interactives, dispositif technologique audiovisuel, moniteurs, projecteurs, haut-parleurs… Une salle équipée en écrans tactiles permet d’initier les enfants à Chopin et à son époque : ils peuvent y naviguer assis sur de confortables coussins… (Photos Musée Fryderyk Chopin).

Varsovie Musée Fryderyk Chopin présentation interactive Varsovie Musée Fryderyk Chopin Marcelina

 

Ci-dessus, au centre, informations sur Marcelina Czartoryska, aristocrate et éminente pianiste polonaise. Éduquée à Vienne, nantie d’un réel talent musical, elle prit des cours avec Carl Czerny puis avec Chopin à Paris, lequel la considérait comme sa meilleure élève. Une peinture de Teofil Kwiatkowski montre Chopin sur son lit de mort, entouré de sa soeur Ludwika, d’Aleksander Jełowicki, de Wojciech Grzymała, de Kwiatkowski et de la princesse Marcelina Czartoryska. Après le décès du compositeur, cette dernière a aidé sa famille à obtenir les papiers nécessaires.

Visite incontournable de la plus grande collection de souvenirs et oeuvres de Chopin
Outre les quelque 1’200 concerts à l’affiche toute l’année 2010 dans tout le pays, l’année Chopin a vu, entre autres, la réouverture de la maison natale de Chopin à Zelazowa Wola et du Musée Frédéric-Chopin. Situé dans l’élégant palais baroque de la famille Ostrogski, sur une rive de la Vistule, celui-ci est considéré comme l’un des musées biographiques les plus modernes, en Europe.
Construit dans la deuxième moitié du XVIIème siècle, le Palais Ostrogski fut transformé à plusieurs reprises et détruit pendant la Deuxième Guerre mondiale. Sa reconstruction à l’identique fut achevée en 1954.

Les débuts du musée datent des années 1930. En 1935, l’ancien Institut Fryderyk Chopin, fondé par les plus imminents représentants du monde de la culture, s’est mis à réunir ses collections et à racheter quelques manuscrits de grande valeur aux proches du compositeur.

Le musée est une unité organisationnelle de l’Institut national Fryderyk Chopin. Sa mission : cultiver la mémoire du grand compositeur, recueillir, analyser, préserver et mettre à disposition du grand public les collections liées à la vie et à l’art de Frédéric Chopin et son époque. Le visiteur active les différents éléments de l’exposition grâce à une carte à puce qui lui sert de ticket et de clé ouvrant les paysages visuels et sonores de son choix.

Varsovie Musée Frédéric Chopin intérieur partition de Chopin Varsovie Musée Frédéric Chopin intérieur piano interactifParcours complet de la naissance à la mort du génial compositeur
Łukasz Kaczmarowski du Département de la promotion et des relations publiques, étant absent, c’est Jan qui est à l’accueil. Surprise : il s’exprime dans un excellent français et prend le temps de me guider à travers les onze salles – onze univers différents – du sous-sol jusqu’au 4ème étage.
On ne sait par où commencer, tant l’œil est attiré par tant d’objets bien présentés, en plusieurs langues : photos, lettres reçues ou écrites par Chopin, portraits, caricatures, manuscrits et éditions originales des oeuvres du compositeur, effets personnels… L’ouïe est, bien entendu, très sollicitée également car le son est une partie importante de l’exposition. Casque sur les oreilles, on peut y entendre la lecture d’une lettre adressée au musicien ou l’intégralité d’un concert avec, au piano, un grand interprète sélectionné.

Varsovie Musée moulage de la main de Frédéric Chopin Varsovie Musée Frédéric Chopin livre de prix remporté par l'élève Chopin

Musée Chopin Varsovie - camée profil Chopin

 

 

Les admirateurs de Chopin, comme ceux qui souhaitent le (re)découvrir, peuvent apprécier en ces lieux la collection “chopinienne” la plus grande au monde, soit quelque 5’000 objets originaux exposés en alternance. (Ci-dessus : le moulage de la main de Chopin, très photographié par les Asiatiques en visite au Musée; un livre, prix remporté par l’élève Chopin, en 1824; un camée représentant le profil du compositeur). Des bornes télévisuelles diffusent des vidéos en plusieurs langues. Dans une salle d’écoute, des livres digitaux permettent de prendre connaissance de toutes les compositions et enregistrements de l’oeuvre du maître. Certes, un concept de haute technologie mais simple d’utilisation.

Comment ne pas laisser libre court à son émotion devant les exercices de calligraphie effectués par le tout jeune Frédéric, par la montre offerte par la cantatrice Angelica Catalani avec inscription : Mme Catalani / à Fréderic Chopin / âgé de 10 Ans. / A Varsovie / le 3 Janvier 1820. Un moment rare : on ne peut que s’attarder devant le dernier piano Pleyel – n° 14810 – sur lequel Frédéric Chopin a composé au cours des deux dernières années de sa vie – 1848 et 1849. Jane Stirling, amie anglaise et grande admiratrice du compositeur  avait  acheté à la firme Pleyel le dernier piano de Chopin qu’elle fit expédier à Varsovie en 1850. Il fut confisqué par les Allemands, envoyé en Autriche en 1944, échappant ainsi aux bombardements, et fut restitué à la Pologne en 1946. C’est celui que l’on peut voir à présent au Musée Chopin de Varsovie.

Des souvenirs des années heureuses passées à Paris et des étés à Nohant, la belle maison berrichonne de George Sand, en compagnie d’artistes
tels que Liszt, Flaubert, Balzac, Théophile Gautier, Pauline Viardot, le peintre Delacroix avec qui le musicien aimait échanger des propos sur l’art… « Après mon dîner, chez Mme Sand (…), le bon petit Chopin nous a fait un peu de musique. Quel charmant génie ! (…) » (Delacroix – 12 mars 1847). Delacroix admirait le pianiste et le compositeur, alors que Chopin n’appréciait guère les toiles du peintre.

Varsovie Musée Frédéric Chopin les voyages de ChopinVarsovie Musée Frédéric Chopin bracelet offert à la soeur de Chopin par Jane Stirling Au deuxième étage, on découvre la personnalité de Chopin et ses voyages européens – dont le fameux séjour à Majorque – entre des murs rénovés et décorations en stuc marquant clairement la différence entre l’ancien et le nouveau.

 

Varsovie Musée Frédéric Chopin les pianistes célèbres

Varsovie Musée Frédéric Chopin le compositeur sur son lit de mort 1849

Chopin (au centre) et Liszt (premier rang, à droite), au lieu des pianistes célèbres à leur époque / Chopin sur son lit de mort / Fleurs mises sous verre,  provenant de la chambre mortuaire du compositeur / Bracelet offert à Ludwika, soeur de Chopin, par Jane Stirling..

 

 

Varsovie Musée Frédéric Chopin fleurs recueillies dans la chambre mortuaire“Encore une gloire musicale qui vient de s’éteindre”. Gazette de la France musicale du 21 octobre 1849. Ces mots figurent en grand, sur fond noir, à l’étage du haut, consacré aux derniers instants de Frédéric Chopin, en 1849, Place Vendôme, à Paris. Vues des amis entourant le lit du mourant, croquis, dessins, fleurs sous verre…

Je m’attarde avec Jan, lui raconte ce que j’ai lu, à savoir que Chopin craignant d’être enterré vivant, souhaitait que son coeur lui soit retiré dès son dernier souflle rendu. Jan ne connaît pas cette version et la réfute. Pour lui, c’est par amour de sa patrie que Chopin a voulu que son cœur retourne en Pologne… Pourtant un mot de la main du compositeur atteste ma version : “Comme cette terre m’étouffera, je vous conjure de faire ouvrir mon corps pour que je ne sois pas enterré vif “.

Nous nous demandons également ce qu’il est advenu de la fortune et des meubles du compositeur… « Malgré le produit considérable de ses oeuvres et des leçons qu’il donnait, Chopin ne laisse pas de fortune ; les malheureux Polonais que l’exil a tant de fois amenés à sa porte savent où cette fortune a passé (…) » Article d’Hector Berlioz, “Journal des Débats” du 27 octobre 1849.

A la mort de Chopin, sa soeur Ludwika, présente à ses côtés depuis plusieurs mois, est chargée de régler sa succession. Son mari lui ordonne de se débarasser de tout ce qui avait appartenu à son frère. Une vente aux enchères anonyme eut donc lieu en novembre 1849. Tout a été vendu et rapporte alors de quoi couvrir les frais d’obsèques. Heureusement, la plus grande partie est achetée par Jane Stirling, amie anglaise et grande admiratrice de Chopin, laquelle avait le projet d’un futur musée Chopin. Hélas, ce projet ne verra pas le jour, et elle léguera par testament à Izabela Barcinska (l’autre soeur de Chopin) la totalité des souvenirs en sa possession. Ils parviendront à Varsovie en 1858, après la mort de Ludwika. Parmi ces souvenirs, une chaise à porteur capitonnée de soie, utilisée par le compositeur – Chopin ayant de grandes difficultés à se déplacer et à monter les escaliers dans les dernières années de sa vie.

Varsovie Palais Zamoïski où habitait Ludwika la soeur de Chopin

Tous ces souvenirs furent sauvés provisoirement et allaient disparaître presque en totalité dans les destructions successives qu’allait connaître la Pologne. Le 19 septembre 1863, suite à une tentative d’attentat contre le délégué du tsar, les Russes à la recherche des coupables perquisitionnèrent dans l’appartement d’Izabela Barcinska, situé au 3ème étage du Palais Zamoïski. Pour se venger, les gardes jetèrent par la fenêtre le piano ramené de Paris qui se fracassa sur le pavé de Nowy Swiat et brûlèrent au pied de la statue de Copernic les meubles, tableaux, manuscrits, livres et partitions de Chopin. Acte barbare qui inspira à Norwid – poète, écrivain, auteur dramatique, penseur, peintre et sculpteur polonais – son poème “Le Piano de Chopin”.

Les pianos de Chopin
Chopin avait conclu une forme de partenariat avec Camille Pleyel : les pianos étaient mis à sa disposition et le musicien lui faisait une belle publicité car nombre de ses élèves ont acquis des pianos Pleyel. Chopin disposait donc d’instruments neufs, souvent renouvelés. Il changeait souvent de pianos pour aller à Nohant, et les pianos au square d’Orléans n’y restaient pas : ils étaient rapidement  vendus ou mis en location par Pleyel.

Les pianos Pleyel conservés sur lesquels Chopin a joué sont au nombre de cinq : le pianino no 6668 à la chartreuse de Valldemosa, le piano à queue no 7267 au musée de la musique à Paris, le piano à queue no12480 au Stiftelsen Musikkulturens Främjande à Stockholm, le piano à queue no 13189 dans la Cobbe Collection à Hatchlands Park (Surrey) et le piano à queue no 14180 au musée Frédéric Chopin à Varsovie (ci-dessous). 

Varsovie Musée Chopin le dernier piano Pleyel de Frédéric ChopinD’autres pianos sont supposés avoir été loués par le maître : c’est le cas du no 11265, piano à queue Pleyel utilisé par Chopin lorsqu’il résidait au
9 square d’Orléans à Paris, de novembre 1844 à juin 1845. Ce piano, retrouvé récemment, appartient à un collectionneur privé allemand. Sa mécanique est, paraît-il, très bien conservée et le son du piano est magnifique. Le numéro de série, en plusieurs endroits sur le piano, atteste de son authenticité. Ce piano pourra être mis à disposition pour certains projets artistiques.

Plusieurs témoignages confirment que Chopin bénéficiait, dans son logement du square d’Orléans, d’un second piano servant à l’accompagnement, le piano à queue étant réservé à ses élèves. La présence d’un piano carré dans l’appartement de Chopin est attestée par Wilhelm von Lenz,  fin 1842 lors d’un concert privé chez le maître. Karol Mikuli, élève depuis 1844, écrivait que Chopin avait « un pianino Pleyel où il interrompait et corrigeait l’élève… ». Une autre élève, Emilia Borzecka, raconte : « Je suis allée chez lui seulement pour quelques leçons. C’était, autant que je m’en souvienne, à la fin de 1846 ou au commencement de 1847. Chopin était déjà très malade à cette époque si bien que pendant les leçons il ne parlait presque pas du tout, mais, assis à un second piano, il jouait certains passages comme il souhaitait qu’ils fussent exécutés ».

Musée Fryderyk Chopin  / 1 Okólnik  /  00-368 Varsovie

http://chopin.museum/en

Visites du musée Fryderyk Chopin et de Żelazowa Wola entre juin et septembre avec le ChopinPass, pack comprenant les entrées prépayées pour les deux endroits et aussi le transport direct entre eux. Pour plus d’informations : www.chopinpass.pl

Texte et photos : Françoyse Krier

Varsovie Musée Fryderyk Chopin entrée avec affiches 

Varsovie Institut Frederic ChopinVarsovie Mur avec notes près du musée Chopin


 

Remerciements à : Ambassade de Pologne à Berne – www.berno.msz.gov.pl/fr / Ministère des Affaires étrangères de Pologne – msz.gov.pl / Polska Agencja Prasowa – pap.pl / Łukasz Kaczmarowski du Département de la promotion et des relations publiques du Musée Fryderyk Chopin à Varsovie

Voir également : 

Pologne – Zelazowa Wola Maison natale de Frédéric Chopin
https://www.fykmag.com/pologne-zelazowa-wola-maison-natale-de-frederic-chopin/

Pologne – Ballades et itinéraire de Chopin à Varsovie
https://www.fykmag.com/balades-et-itineraire-de-chopin-a-varsovie/

Pologne – Varsovie  Regards sur la ville 
Pologne Varsovie, ville nouvelle et ancienne à la fois

 

 

 

 

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