Le Musée national Zurich inaugure une nouvelle exposition fascinante qui explore les relations étroites, souvent surprenantes, qui ont uni
la Suisse et les familles royales. En effet, les têtes couronnées ont régné sur des royaumes, marqué leur époque et adoré venir en villégiature
en Suisse, suscitant enthousiasme et fascination, étonnement, ferveur, voire critiques, au sein de la population suisse. L’exposition démontre
le choix du gotha pour la Confédération en tant que havre de paix, que ce soit y trouver du repos ou un refuge, en qualité d’invités officiels,
pour se mettre en scène ou mener des négociations. Parcours et séjours de personnalités royales ayant régulièrement séjourné en Suisse :
anecdotes étonnantes, photographies, tableaux, écrits et objets personnels ayant appartenu aux membres des familles royales…
A découvrir au Landesmuseum – Zurich jusqu’au 9 novembre 2025.


Ci-contre : Elégante en selle, l’impératrice Élisabeth est une icône de la mode et de l’équitation. Ses tenues de cavalière – haut-de-forme, bottes et cravache – sont confectionnées avec des tissus raffinés, souvent garnis de fourrure. Ses couleurs : de préférence du gris, du bleu foncé et du vert foncé. Après le suicide en 1889 de son fils, le prince héritier Rodolphe, l’impératrice ne portera que du noir en signe de deuil, même durant ses voyages en Suisse. |


Élisabeth d’Autriche, reine de Hongrie
Grande marcheuse – elle pouvait parcourir jusqu’à 30 km par jour – et toujours en quête de calme, de nature et de distanciation par rapport à la cour, l’impératrice Élisabeth d’Autriche (Sissi) a effectué de nombreux séjours en Suisse. Lauterbrunnen, Brienz, Interlaken, Lucerne, Zürich, Montreux… Cette «superstar» voyageait souvent incognito en Suisse, sous un nom d’emprunt – comtesse de Hohenems – sans toujours y parvenir. Sa dernière visite s’est terminée tragiquement : le 10 septembre 1898 : elle meurt à Genève, assassinée par l’anarchiste italien Luigi Lucheni. Les autorités suisses avaient proposé à l’impératrice une protection policière, mais elle y avait renoncé. La Suisse est bouleversée par ce drame : les cloches des églises sonnent le glas – à Lausanne, Fribourg, Berne, Aarau, Baden et Zürich – et des milliers de personnes se sont massées pour suivre le cortège funèbre, le 14 septembre, depuis l’Hôtel Beau-Rivage jusqu’à la gare de Cornavin où un train spécial a emmené la dépouille jusqu’à Vienne. Des représentants des milieux politiques, économiques et militaires forment une haie d’honneur. Entre autres objets, l’exposition présente la lime avec laquelle l’impératrice fut poignardée et qui fut offerte, en 1965, à l’Université de Vienne par le canton de Genève.
Louis II de Bavière

Son cousin, le roi Louis II de Bavière éprouvait lui aussi une fascination pour la Suisse, et en particulier pour le Grütli, lieu
de naissance symbolique de la démocratie helvétique.
En 1865 et en 1881, le roi s’est rendu sous un nom d’emprunt au lac des Quatre-Cantons. Il séjourne à l’hôtel Schweizerhof à Lucerne, puis au Weisses Rössli. On le signale à Brunnen, Küssnacht, Seelisberg, Bürglen… Le jeune monarque rêvait de se voir octroyer le statut de citoyen honoraire par les cantons de Schwytz et d’Uri. Il souhaitait acquérir le Grütli et bâtir un château sur la prairie où fut prononcé
le fameux serment. C’est sur la Suisse qu’il avait en effet projeté ses aspirations politiques et romantiques, qui restèrent finalement
des rêves inassouvis.
Photo inconvenante :
L’enthousiasme de Louis II pour Guillaume Tell de Friedrich Schiller incite le roi à voyager incognito en Suisse centrale.
Le voyage de 1881 s’achève par la visite d’un atelier photographique à Lucerne.
Cette photo (à gauche) transgresse toutes les règles de la cour :
la main de Josef Kainz, posée sur l’épaule du roi assis, est jugée si déplacée que la photo est retouchée.
La reine Hortense de Beauharnais

Lorsque Napoléon Bonaparte est renversé en 1815, sa belle-fille, la reine Hortense de Beauharnais, doit fuir la France avec son fils de sept ans, Louis-Napoléon, et se réfugier en Suisse. Pour remercier l’abbaye d’Einsiedeln de l’avoir accueillie lors de sa fuite, la reine Hortense lui offre de précieux bijoux. La magnifique broche aux hortensias (à gauche) aurait été portée par sa mère, l’impératrice Joséphine, lors de son couronnement. Cette broche en argent avec diamants et rubis a été conçue et réalisée vers 1807 par Marie-Etienne Nitot pour la maison de joaillerie Chaumet à Paris.
Cette bague en or (à droite) avec topaze appartenait probablement
à Napoléon Bonaparte, le beau-père de la reine Hortense de Beauharnais. Pour remercier l’abbaye d’Einsiedeln de l’avoir accueillie lors de sa fuite, la reine Hortense lui offre ce précieux bijou.

Léopold III, roi des Belges, et la reine Astrid
Le 29 août 1935, la reine Astrid de Belgique meurt dans un accident de voiture à Küssnacht, sur le lac des Quatre-Cantons. Le conducteur n’est autre que Léopold III, roi des Belges, et la victime de l’accident, sa jeune épouse Astrid, reine des Belges. C’est
le dernier jour de leurs vacances, le soleil brille… Léopold souhaite conduire lui-même et prendre la route qui longe le lac. Après tout, ils viennent d’acquérir un nouveau cabriolet huit cylindres avec des pneus à flancs blancs. Mais le conducteur manque d’expérience. Entre Merlischachen et Küssnacht, il sort de la route et s’écrase avec fracas contre un poirier.

Le roi et blessé mais sa passagère, projetée hors du véhicule, meurt sur le coup. La chapelle, érigée sur le lieu de l’accident, remémore encore aujourd’hui ce tragique événement et continue d’attirer des visiteurs et des personnes souhaitant s’y recueillir. Le décès tragique de la reine Astrid provoque une onde de choc en Belgique où elle était très populaire, comme dans le monde entier. « La Suisse aussi est profondément attristée », écrit la Schweizer Illustrierte le 4 septembre 1935, et la Berne fédérale exige « immédiatement un rapport de police détaillé » sur les circonstances de l’accident. |
Hailé Sélassié, le roi des rois

Dernier empereur d’Éthiopie, Hailé Sélassié (1892-1975) est venu à plusieurs reprises à Genève et dans plusieurs autres villes de Suisse. Il avait quant à lui des projets beaucoup plus concrets lors de son voyage en 1954 où plus de 100 000 personnes l’accueillirent à Berne. Ce n’étaient
pas tant les montagnes qui l’intéressaient, mais plutôt la Suisse moderne et industrielle avec laquelle il souhaitait nouer des relations commerciales. Le Négus voulait que l’Éthiopie devienne le pays le plus développé d’Afrique grâce à une modernisation à marche forcée. L’empereur était aussi animé par d’autres intentions lors de sa visite des usines du fabricant d’armes zurichois Emil Bührle qui, en dépit de l’embargo en vigueur, devait lui livrer des armes. L’empereur d’Éthiopie Haïlé Sélassié visite Berne, Zurich, Baden et Genève fin novembre 1954. La presse internationale célèbre Haïlé Sélassié comme une vedette politique. L’intérêt
à l’égard de cet illustre hôte est immense, les journaux publient chaque jour des articles à ce sujet. Des dizaines de milliers de personnes bordent les rues et acclament l’empereur à son passage. L’exposition montre notamment un poil de la crinière de lion ornant la coiffe d’Hailé Sélassié, prélevé subrepticement par un officier de carrière suisses, désireux de garder un souvenir personnel.
Élisabeth II et le prince Philip



Lors de leur visite d’État en avril 1980, la souveraine britannique Élisabeth II et le prince Philip accomplissent un programme bien rempli. Les mesures de sécurité les plus strictes sont prises pour le voyage qui les conduit à Berne, Montreux, Lucerne, au Grütli, à Zurich. A Lausanne, la reine Elisabeth II et le prince Philip sont accueillis devant le Palais de Beaulieu par le président de la communauté britannique. La reine Élisabeth II fait une halte à l’exposition « Grün 80 » à Bâle le 1er mai 1980. Elle y plante un arbre en présence de 80 000 curieux. Mais entre-temps, non loin de là, des jeunes protestataires scandent « Marchons unis, mettons le feu à la reine ! »
Visites royales – de Sissi à la reine Élisabeth
Musée national suisse – Landesmuseum Zürich
jusqu’au 9 novembre 2025
Tél. +41 44 218 65 11
www.landesmuseum.ch/royales
L’exposition sera présentée sous une forme adaptée au Château de Prangins du 19 mars au 10 octobre 2027