“La mer, c’est d’abord un bruit lointain, sourd et uniforme…” (Jules Michelet)
Cette exposition automnale est présentée au MCBA (Musée cantonal des beaux- arts de Lausanne) sous forme d’une immersion en terrain fantasmagorique : la mer… Ou plutôt l’imaginaire sur la mer, ses mystères et ses beautés, l’émerveillement qu’elle procure, sa manifestation dans les œuvres d’art figuratives, en Europe, du XIXème siècle à nos jours. Un voyage en bord de mer et dans ses profondeurs, en compagnie d’œuvres de (entre autres) : Arnold Böcklin, François Bocion, Edward Burne-Jones, Jean-Francis Auburtin, Albert Marquet, Maurice Pillard-Verneuil, Jean Painlevé, Max Ernst, Man Ray, Marcel Broodthaers, Caroline Bachmann et Stefan Banz, François Burland, Miriam Cahn, Sandrine Pelletier, Margaret Wertheim et Christine Wertheim.
Le titre de l’exposition correspond au cri poussé en 400 avant JC, du haut d’une colline, par une troupe de mercenaires apercevant la mer Noire Thalassa ! Thalassa! (La mer ! La mer!). Ayant erré longuement dans l’Empire perse ils ne pensaient plus jamais revoir la mer ni leur patrie.
L’exposition interroge notre relation à la mer, telle qu’elle se manifeste dans les œuvres figuratives, en Europe, du XIXème siècle à nos jours. Trois thèmes y sont abordés sur deux étages : Rivages, Profondeurs et Abysses. À l’heure de la prise de conscience du rôle de l’humain dans la dégradation des écosystèmes, ces thèmes sont le théâtre d’interrogations qui se révèlent d’une actualité brûlante. A découvrir jusqu’au 12 janvier 2025.
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La mer est un espace de rigueur et de liberté. (Victor Hugo)
Au gré de l’aménagement des rives, du développement de la navigation et de l’avancée de la géologie et de la zoologie, le regard posé sur l’Océan et ses habitants réels ou imaginaires n’a pas cessé d’évoluer. De nombreuses inventions techniques ont accompagné ces changements : scaphandre, aquarium, cloche à plongeur, véhicule sous-marin…
Rivages – Vue de loin et de haut, la mer apparaît plane et lisse ; de plus près et de plus bas, elle se structure au gré du mouvement des eaux. Pour l’artiste, la mer est délimitée par ses points de rencontre avec la plage et avec le ciel. Au tournant du XIXème siècle, les paysagistes la représente dans de grandes vues panoramiques où le grand large est toujours tenu à distance. Bientôt, les peintres romantiques installent leurs chevalets sur le rivage pour mieux représenter le paysage marin est séparé en trois bandes parallèles : la plage, l’eau et le ciel. Le tourisme balnéaire leur offre des sujets nouveaux : foules accourues au bord de la Méditerranée et de l’Atlantique pour profiter des bienfaits de l’air iodé, et les loisirs nautiques réservés d’abord aux élites. Sans oublier les «marines», toiles peintes et accrochées aux murs, sensées introduire le frisson du grand large dans les intérieurs bourgeois…
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Homme libre, toujours tu chériras la mer ! (Charles Baudelaire. L’homme et la mer)
Profondeurs – Avec le roman Vingt mille lieues sous les mers (1869–1870), Jules Verne entraîne son époque au fond de l’eau. L’écrivain anticipe les campagnes océanographiques qui, telle l’expédition Challenger (1872– 1876), vont cartographier les reliefs sous- marins et répertorier la vie dans les profondeurs. Aquariums des stations de biologie marine, vitres des cloches de plongée ou des scaphandres : armés d’un crayon – plus tard d’un appareil photographique – les artistes tentent de croquer la faune et la flore marines «en pleine eau».
La vie sous-marine offre un répertoire inédit : les ornemanistes s’en inspirent pour embellir les tissus, les vases, les papiers peints ou encore les carreaux de céramique. Les objets de la vie quotidienne se parent de motifs d’algues, d’étoiles de mer, de coquillages ou de méduses.
Abysses – A partir des années 1880, les artistes symbolistes revisitent le répertoire et se réfugient dans un cosmos régi par des forces inconnues. Héritiers des symbolistes, les surréalistes poursuivent l’exploration des gouffres de l’intériorité. André Breton et ses adeptes effectuent la synthèse entre le réel et l’imaginaire, l’objectivité et la subjectivité. Ils sont à la fois la mer et le scaphandre, le poisson et le pêcheur. Les ondines, créatures hy- brides, moitié humaines, moitié marines, incarnent ce rêve de fusion avec l’Autre. Les images des premiers documentaires scientifiques sur les pieuvres, les hippocampes ou les méduses fascinent…
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Redonner des couleurs au corail
Au 2ème étage, partie contemporaine de l’exposition : «The Crochet Coral Reef». Sensibilisées par la destruction des récifs coraliens due, entre autres, par la pollution et le réchauffement climatique, les jumelles Margaret et Christine Wertheim, nées en 1958 en Australie, ont confié la réalisation des pièces crochetées de cette œuvre collective à près de 4000 femmes. Ce projet, créé en 2022 par les deux sœurs et l’Institute For Figuring, présente plus de 40 000 coraux réalisés au crochet et assemblés en d’immenses îles coralliennes. Une œuvre collective entre l’individuel et le communautaire… Les noms des participantes-créatrices sont inscrits sur le mur du fond.
Raconte-moi la mer Dis-moi son aube pâle Et le bleu et le vert Qui tombent des étoiles (Jean Ferrat)
Thalassa! Thalassa! L’imaginaire de la mer ~ Jusqu’au 12 janvier 2025
Musée cantonal des Beaux-Arts
PLATEFORME 10 // Place de la Gare 16 // 1003 Lausanne Suisse
Tél. : +41 213184400
Visites commentées :
Chaque dimanche à 11h ~ Jeudis 17 octobre, 21 novembre, 19 décembre et 9 janvier à 18h30
Visites par les commissaires de l’exposition ~ Catherine Lepdor, conservatrice en chef, MCBA, et Danielle Chaperon, professeure de littérature française, Université de Lausanne : Jeudi 5 décembre à 18h30 – Dimanche 12 janvier à 15h