MCBA Lausanne ~ Exposition Surréalisme. Le Grand Jeu

La créativité est cette capacité merveilleuse à saisir des réalités mutuellement distinctes et à tirer une étincelle de leur juxtaposition”,
a dit Max Ernst, rattaché aux mouvements Dada et surréaliste.
“Nous voulons supprimer le désir pour toute forme de beauté, de culture, de poésie, pour tout raffinement intellectuel, toute forme de goût, socialisme, altruisme et synonymisme”, ont dit les dadaïstes

Le Grand Jeu emprunte son titre à une revue publiée à la fin des années 1920 par un groupe d’artistes français dissident du surréalisme. Cette exposition rassemble plus de soixante artistes historiques et contemporains pour interroger l’actualité de ce mouvement à travers le prisme fascinant du jeu.

Le premier étage du Musée cantonal des Beaux Arts de Lausanne est consacré au parcours historique et aborde le jeu dans ses multiples aspects récréatif comme subjectif ou critique. Il s’agit surtout de mettre en avant l’exaltation créatrice mise en oeuvre par les surréalistes. Les thèmes chers aux surréalistes sont présents tout au long du parcours avec des sections intitulées “Un monde en métamorphose”, “Esotérisme”, “Les mystères de l’occulte”, “Au-delà de la figuration”, “Les voix du silence” ou encore “Ambivalence du désir”. A découvrir jusqu’au 25 août 2024.

Le Jeu d’échecs

Cadavre Exquis, 1928. André Breton, Marcel Duhamel, Max Morisse, Yves Tanguy.
Cadavre Exquis, 1928. André Breton, Marcel Duhamel, Max Morisse, Yves Tanguy. Crayon et crayon de couleur sur papier. Collection David et Marcel Fleiss.
Man Ray, Breton solarisé, 1930
Man Ray, Breton solarisé, 1930.
Epreuve sur papier sur gélatino-bromure d’argent, tirage réalisé en 1988. Collection Photo Elysée.
Man Ray Jeu d'échec avec Raoul de Roussy, 1
Man Ray Jeu d’échecs avec Raoul de Roussy, 1924. Epreuve sur papier au gelatino-bromure d’argent. Collection Photo Elysée.

Les échecs sont le point de départ de cette section qui témoigne de l’engouement surréaliste pour les stratégies créatrices de l’automatisme aux jeux d’enfants. Marcel Duchamp est le joueur d’échecs le plus chevronné du milieu surréaliste. Reposant sur une structure géométrique qui renvoie à un nombre infini de combinaisons, les échecs deviennent une métaphore de la quête de la perfection artistique.

Maurice Henry. Portrait des Surréalistes, 1950.
Maurice Henry. Portrait des Surréalistes, 1950. Encre de chine sur traits au graphite sur papier vélin. Reims, Musée des Beaux-Arts.
Max Ernst. Fou de lune, 1944.
Max Ernst. Fou de lune, 1944. Bronze. Fondation Beyeler, Riehen / Bâle. Sculpture qui fait allusion
aux pouvoirs spécifiques
de la lune.
Man Ray. Objet indestructible, métronome
Man Ray. Objet indestructible, conçu en 1923, réalisé en 1964. M.tronome en boois laquél, photo, tromoobone, édition MAT. Courtesy Collection Thaddeus Ropac. Paris-Salzburg

Jeux de cartes, magie de l’image

Surréalisme Jeu de Marseille

En hiver 1940-41, fuyant l’occupation nazie, un groupe d’artistes surréalistes se réfugie sur les hauteurs de Marseille, à la villa Air-Bel. Dans l’attente d’un visa pour quitter le France en direction des Etats-Unis, ils inventent un jeu de cartes connu depuis sous le nom de Jeu de Marseille : les couleurs traditionnelles y acquièrent une dimension symbolique : le trèfle devient le trou de serrure noir de la Connaissance, le carreau, la tache de sang rouge de la Révolution, le pique, l’étoile noire du Rêve et le coeur, la flamme rouge de l’Amour. Substituant de nouvelles images aux images anciennes, le Jeu de Marseille constitue le point de départ de cette section qui explore le rôle central joué par l’ésotérisme dans le développement du mouvement.

Le surréalisme repose sur la conviction qu’il existe une réalité supérieure dans certaines formes d’associations négligées jusqu’à lui, comme entre autres la toute-puissance du rêve ou le jeu désintéressé de la pensée. En réactualisant la dimension poétique de la peinture, le surréalisme se heurte à la question de la représentation du non-figurable et de l’indicible. Les artistes surréalistes déforment les objets pour créer de nouvelles approches plastiques, iconographiques et utilisent différentes techniques comme le dessin automatique, le collage, le frottage… Les thèmes souvent retrouvés sont : le rêve, l’imagination, les phénomènes extraordinaires…

Organisée par Marcel Duchamp, André Breton et Aimé Maeght “L’exposition Internationale de Surréalisme en 1947” sera un des évènements qui feront connaître la fameuse Galerie Maeght mondialement. Quel en fut le résultat ? Rien de vendu car rien à vendre, des discussions sans fin mais tant de nouvelles et admirables rencontres…

Salvador Dali Cygnes reflétant des éléphants, 1937
Salvador Dali Cygnes reflétant des éléphants, 1937. Huile sur toile.
Esther Grether Family Collection ©Salvador Dali,
Fundacion Gala-Salvador Dali /2024 ProLitteris Zurich
René Magritte, Mouvement perpétuel, 1935.
René Magritte, Mouvement perpétuel, 1935.
Huile sur toile. Esther Grether family Collection.
Dorothea Tanning, Ma vie dans la chambre bleue,
Dorothea Tanning, Ma vie dans la chambre bleue, 1943. Huile sur toile.
Collection privée.

Ithell Colquhoun La Cathédrale engloutie, 1950
Ithell Colquhoun La Cathédrale engloutie, 1950. Huile sur toile. RAW collection
© Droits réservés, 2024

Marcel Duchamp a été l’un des premiers surréalistes à considérer des objets manufacturés comme des objets d’art, parfois en apposant juste une signature ou en y inscrivant une phrase pour inviter à la réflexion ou à la rêverie. Comme sa cage à oiseau “… sans oiseau mais avec des indices: un os de seiche, un thermomètre et des morceaux de sucre”.
Toutes les interprétations, même les plus farfelues, réjouissaient Duchamp car, pour lui, elles étaient avant tout le fruit d’une imagination pure déclenchée par ses œuvres. 

Mario Prassinos Sans titre (Etude d'oeil), 1937.
Mario Prassinos Sans titre (Etude d’oeil), 1937. Aquarelle sur papier. Succession Mario Prassinos 2024, ProLitteris Zurich
Léonor Fini, L’Argonaute, 1936. Huile sur toile. Musée d’art
du Valais, Sion.
Suzanne Duchamp ( L'Homme aveugle, 1925
Suzanne Duchamp (Soeur de Marcel Duchamp) L’Homme aveugle, 1925. Huile sur toile. Alychio/Marc Coucke Art Collection Belgium
Mayo, La voilette, 1930-1031.
Mayo, La voilette, 1930-1031.
Huile sur toile.
Collection du centre culturel européen de Delphes.

La présentation continue au deuxième étage où huit artistes contemporains réaffirment leur défiance vis-à-vis de la langue et leur foi dans la toute puissance du conte exprimant leur fascination pour la frontière entre le visible et l’invisible… Des “résonances” surgissent aussi entre les deux étages de l’exposition, par exemple autour de la figure d’Elise Müller – connue sous le nom d’Hélène Smith -, une médium et artiste genevoise qui a inspiré de nombreuses figures du surréalisme au siècle dernier. La vie et les visions d’Elise Müller figurent au cœur du travail de deux artistes romands, la Lausannoise Maëlle Gross et le Genevois Tristan Bartolini.

Marcel Duchamp Prière de toucher - le surréalisme en 1947.
Marcel Duchamp Prière de toucher – le surréalisme en 1947. catalogue relié en papier avec colalge en mousse de caoutchouc, pigments, velours noir monté sur papier cartonné, étui accompagnant avec étiquette e n papier imprimée collée à l’extérieur.
Marcel Duchamp Pourquoi ne pas éternuer Rose Sélavy ?
Marcel Duchamp Pourquoi ne pas éternuer Rose Sélavy ?, conçu en 1921, réalisé en 1964. cage de bois et métl peiont en blanc, 152 cubes de marbre, thermomètre, os de seiche. Galerie d’Art moderne et contemporain, Rome. Don d’Arturo Schwarz, 1998.
Anne Le Troter, bancs tendus en câble audio,
Anne Le Troter, pour regarder sa pornoplante, 2023 installation son, le public s’assoie sur des bancs tendus en câble audio, gaines, boîte en acier thermolaqué. Courtesy de l’artiste et de la Galerie Franck Elbaz.
Charlie Maigat. 
Double paysage, 2023-2024
Charlie Maigat. Bergerac, 1990.
Double paysage, 2023-2024. Installation, caoutchouc, latex, mousse, vernis acrylique argenté.

Maëlle Gross. la Bête Astané, 2024.
Robot avec senseurs, coque en céramique émaillée.
Collaboration technique :
Michèle Rochat et Christaine Babski.
Tristan Bartolini, Genève 1997. La voie vers les ancêtres,
Tristan Bartolini, Genève 1997. La voie vers les ancêtres, 2024.Polystyrène, plâtre, MDF, spots lumineux, projection vidéo, coouleur avec son. Collection de l’artiste.

Le Jeu de dés

Le jeu de dés entraîne les surréalistes dans le champ du hasard. C’est en imaginant la face vierge d’un dé que l’on entre sur le terrain de jeu illimité de la page blanche.

Les Mystères du château du Dé est un documentaire de Man Ray à la demande du vicomte Charles de Noailles, tourné en 1929 sur sa villa d’Hyères construite par Robert Mallet-Stevens. Le titre est inspiré du poème de Stéphane Mallarmé : Un coup de dés jamais n’abolira le hasard. A voir au 2ème étage de l’exposition.

Man Ray (Philadelphie, 1890-Paris 1976) : Les Mystères du Château du dé. 1929. Film 35 mm numérisé en 2K, noir et blanc, son. Cinédoc Paris Film Coop/2024 © Man Ray 2015 Trust/2024, ProLitteris, Zurich.

Man Ray Les Mystères du Château du dé.
Man Ray ( Les Mystères du Château du dé. 1929. Film 35 mm numérisé en 2K
Marion Adnams Emperor Motha / Thunder on the Left

Musée cantonal des beaux-Arts
PLATEFORME 10
Place de la Gare 16
1003 Lausanne Suisse
A découvrir jusqu’au 25 août 2024

Tél. : +41 21 318 44 00
www.mcba.ch

Horaires :
Mardi – dimanche 10 h – 18 h
Jeudi 10 h – 20 h
Lundi fermé

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Visuel de l’affiche de l’exposition : Marion Adnams Emperor Motha / Thunder on the Left, 1903. Huile sur panneau. RAW collection © Marion Adnams/Droits réservés

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