“La créativité est cette capacité merveilleuse à saisir des réalités mutuellement distinctes et à tirer une étincelle de leur juxtaposition”,
a dit Max Ernst, rattaché aux mouvements Dada et surréaliste.
“Nous voulons supprimer le désir pour toute forme de beauté, de culture, de poésie, pour tout raffinement intellectuel, toute forme de goût, socialisme, altruisme et synonymisme”, ont dit les dadaïstes
Le Grand Jeu emprunte son titre à une revue publiée à la fin des années 1920 par un groupe d’artistes français dissident du surréalisme. Cette exposition rassemble plus de soixante artistes historiques et contemporains pour interroger l’actualité de ce mouvement à travers le prisme fascinant du jeu.
Le premier étage du Musée cantonal des Beaux Arts de Lausanne est consacré au parcours historique et aborde le jeu dans ses multiples aspects récréatif comme subjectif ou critique. Il s’agit surtout de mettre en avant l’exaltation créatrice mise en oeuvre par les surréalistes. Les thèmes chers aux surréalistes sont présents tout au long du parcours avec des sections intitulées “Un monde en métamorphose”, “Esotérisme”, “Les mystères de l’occulte”, “Au-delà de la figuration”, “Les voix du silence” ou encore “Ambivalence du désir”. A découvrir jusqu’au 25 août 2024.
Le Jeu d’échecs
Les échecs sont le point de départ de cette section qui témoigne de l’engouement surréaliste pour les stratégies créatrices de l’automatisme aux jeux d’enfants. Marcel Duchamp est le joueur d’échecs le plus chevronné du milieu surréaliste. Reposant sur une structure géométrique qui renvoie à un nombre infini de combinaisons, les échecs deviennent une métaphore de la quête de la perfection artistique.
Jeux de cartes, magie de l’image
En hiver 1940-41, fuyant l’occupation nazie, un groupe d’artistes surréalistes se réfugie sur les hauteurs de Marseille, à la villa Air-Bel. Dans l’attente d’un visa pour quitter le France en direction des Etats-Unis, ils inventent un jeu de cartes connu depuis sous le nom de Jeu de Marseille : les couleurs traditionnelles y acquièrent une dimension symbolique : le trèfle devient le trou de serrure noir de la Connaissance, le carreau, la tache de sang rouge de la Révolution, le pique, l’étoile noire du Rêve et le coeur, la flamme rouge de l’Amour. Substituant de nouvelles images aux images anciennes, le Jeu de Marseille constitue le point de départ de cette section qui explore le rôle central joué par l’ésotérisme dans le développement du mouvement.
Le surréalisme repose sur la conviction qu’il existe une réalité supérieure dans certaines formes d’associations négligées jusqu’à lui, comme entre autres la toute-puissance du rêve ou le jeu désintéressé de la pensée. En réactualisant la dimension poétique de la peinture, le surréalisme se heurte à la question de la représentation du non-figurable et de l’indicible. Les artistes surréalistes déforment les objets pour créer de nouvelles approches plastiques, iconographiques et utilisent différentes techniques comme le dessin automatique, le collage, le frottage… Les thèmes souvent retrouvés sont : le rêve, l’imagination, les phénomènes extraordinaires…
Organisée par Marcel Duchamp, André Breton et Aimé Maeght “L’exposition Internationale de Surréalisme en 1947” sera un des évènements qui feront connaître la fameuse Galerie Maeght mondialement. Quel en fut le résultat ? Rien de vendu car rien à vendre, des discussions sans fin mais tant de nouvelles et admirables rencontres…
Marcel Duchamp a été l’un des premiers surréalistes à considérer des objets manufacturés comme des objets d’art, parfois en apposant juste une signature ou en y inscrivant une phrase pour inviter à la réflexion ou à la rêverie. Comme sa cage à oiseau “… sans oiseau mais avec des indices: un os de seiche, un thermomètre et des morceaux de sucre”.
Toutes les interprétations, même les plus farfelues, réjouissaient Duchamp car, pour lui, elles étaient avant tout le fruit d’une imagination pure déclenchée par ses œuvres.
La présentation continue au deuxième étage où huit artistes contemporains réaffirment leur défiance vis-à-vis de la langue et leur foi dans la toute puissance du conte exprimant leur fascination pour la frontière entre le visible et l’invisible… Des “résonances” surgissent aussi entre les deux étages de l’exposition, par exemple autour de la figure d’Elise Müller – connue sous le nom d’Hélène Smith -, une médium et artiste genevoise qui a inspiré de nombreuses figures du surréalisme au siècle dernier. La vie et les visions d’Elise Müller figurent au cœur du travail de deux artistes romands, la Lausannoise Maëlle Gross et le Genevois Tristan Bartolini.
Le Jeu de dés
Le jeu de dés entraîne les surréalistes dans le champ du hasard. C’est en imaginant la face vierge d’un dé que l’on entre sur le terrain de jeu illimité de la page blanche.
Les Mystères du château du Dé est un documentaire de Man Ray à la demande du vicomte Charles de Noailles, tourné en 1929 sur sa villa d’Hyères construite par Robert Mallet-Stevens. Le titre est inspiré du poème de Stéphane Mallarmé : Un coup de dés jamais n’abolira le hasard. A voir au 2ème étage de l’exposition.
Man Ray (Philadelphie, 1890-Paris 1976) : Les Mystères du Château du dé. 1929. Film 35 mm numérisé en 2K, noir et blanc, son. Cinédoc Paris Film Coop/2024 © Man Ray 2015 Trust/2024, ProLitteris, Zurich.
Musée cantonal des beaux-Arts
PLATEFORME 10
Place de la Gare 16
1003 Lausanne Suisse
A découvrir jusqu’au 25 août 2024
Tél. : +41 21 318 44 00
www.mcba.ch
Horaires :
Mardi – dimanche 10 h – 18 h
Jeudi 10 h – 20 h
Lundi fermé
as
Visuel de l’affiche de l’exposition : Marion Adnams Emperor Motha / Thunder on the Left, 1903. Huile sur panneau. RAW collection © Marion Adnams/Droits réservés