La Fondation de l’Hermitage à Lausanne expose 150 chefs-d’œuvre de collections suisses publiques et privées, réalisés au pastel sec, technique à la croisée du dessin et de la peinture qui a séduit de nombreux artistes au fil des siècles.

Hermitage Lausanne Pastel Rosalba Carriera - Dame, avant 1740Maurice Quentin de La Tour - Madame Cailloux 1740-1750. PastelHermitage Lausanne Pastel -Federico Barocci - Tête de jeune femme.

Rosalba Carriera – Dame, avant 1740. Pastel sur papier. Coll.
privée. // Maurice Quentin de La Tour – Madame Cailloux 1740-1750. Pastel sur papier. Coll. privée. // Federico Barocci – Tête de jeune femme. 1585-1590. Fusain, sanguine et pastel sur papier vergé. Coll. Jean Bonna, Genève. Photo P. Goetelen.

 

L’exposition Pastels, du 16ème au 21ème siècle, est inspirée par les Danseuses au repos de Degas, joyau des collections de l’Hermitage auquel elle veut rendre hommage. Elle met en avant les différents usages de ce matériau si particulier, en présentant les artistes qui l’ont porté à des sommets de maîtrise et en ont exploré les multiples possibilités.

Hermitage Lausanne Exposition pastelsLe bâton de craie tendre fut d’abord utilisé comme une technique de rehaut permettant d’amener la couleur dans une étude. Au XVIIIème siècle, le pastel, qui recouvre désormais l’entière surface des œuvres, est apprécié surtout pour sa capacité à exprimer la richesse des textures et le velouté de la peau, à restituer la lumière, et traduire la vie. C’est l’âge d’or du portrait, représenté ici par des pastellistes de première force alors immensément populaires.

Sec ou gras, le pastel, petit bâtonnet de couleur, serait apparu en France et en Italie dans le courant du XVème siècle. L’âge d’or du pastel se situe aux XVIIIème et XIXème siècles. Autour de 1720, le pastel est reconnu comme une peinture, et avec Léonard de Vinci en tant que matériau de dessin. Rosalba Carriera, peintre vénitienne, lança la mode du pastel en France lors de son passage à Paris, sous la régence de Louis XV, et obtint un vif succès. Le portrait est alors à la mode. Il y avait alors à Paris environ 2’500 pastellistes. Les plus réputés furent Quentin de la Tour, Carriera, Perroneau, Chardin, Watteau et Fragonard.

 

Une nouvelle conception de la peinture…


Hermitage lausanne s Edgar Degas - Danseuses (Danseuses au repos) Hermitage Lausanne Edgar Degas Paysage en bord de mer,
Edgar Degas – Danseuses (Danseuses au repos) vers 1898.
Pastel sur 5 feuilles de papier calque contrecollées sur carton.
Fondation de l’Hermitage, Lausanne. Legs Lucie Schmidheiny, 1998.
Photo Giorgio Skory

Edgar Degas
Paysage en bord de mer,
vers 1892
Monotype à l’huile rehaussé
au pastel
Musée d’art et d’histoire, Neuchâtel.

 

 

 

 

Avec Jean-François Millet, le pastel connaît au siècle suivant un renouveau qui attire sur lui l’attention des jeunes artistes. Eugène Boudin puis Alfred Sisley y ont recours pour saisir les effets éphémères de la nature, tandis qu’Edouard Manet et Edgar Degas se l’approprient avec une inventivité et une liberté absolues, accomplissant la fusion, dans le pastel, du dessin et de la couleur pure.

Le pastel convient parfaitement à Degas qui en est l’un des principaux interprètes. Mary Cassat, Berthe Morisot, Toulouse-Lautrec, Boudin, Bazille
s’y essaieront et excelleront, sans oublier les pastellistes américains : Déborah Deichler, Jane Lund, Sally Stand, Domingo Alvarez, Joan Marti et Olmedo, et bien d’autres…

 

Hermitage Lausanne Pastels Odilon Redon - RêverieOdilon Redon - A la dérive (La Barque),

Odilon Redon – Rêverie,
vers 1900
Pastel et fusain sur papier
Collection privée.
Odilon Redon – A la dérive (La Barque), 1906
Pastel sur carton
Collection privée.

 

“Mes dessins inspirent et ne se définissent pas. Ils ne déterminent rien. Ils nous placent, ainsi que la musique, dans le monde ambigu de l’indéterminé…” écrit Odilon Redon qui parvient à “mettre de la lumière sur du papier”.

 

 

 

La voie très personnelle d’Odilon Redon
Une salle de l’Hermitage est consacrée à Odilon Redon : on ne peut que rêver devant cet univers si personnel, où l’ambiance douce lumineuse contraste avec les touches de couleurs vives. Ses œuvres reflétant le rêve et l’imaginaire, les visions et les songes de l’artiste ont suscité l’admiration de la jeune génération symboliste et des peintres postimpressionnistes comme Gauguin et les Nabis.

Au milieu des années 1890, le pastel devient son matériau de prédilection : l’aspect flou et évanescent de cette matière est propice à ses thématiques mythologiques, bibliques, littéraires. Le « roi des mondes imaginaires » pose le pastel sur des dessins préparatoires au fusain à sec
ou à le mêlant à de la gouache. Par la suite, il travaillera par couches de pigments superposés à l’instar de Degas.

 

Le renouveau du pastel au XXème siècle

Eugène Crasset - Lac Léman en hiver. PastelAlfred Sisley - Les oies au bord du Loing, Nicolas Party - Sunset 2017. pastel

Eugène Crasset – Lac Léman en hiver. Pastel sur papier. Musée Jenisch, Vevey // Alfred Sisley – Les oies au bord du Loing, 1890 – 1894. Pastel sur papier bleu marouflé sur toile. Coll. privée. Photo Eric Frigière  //  Nicolas Party – Sunset 2017. Pastel sur papier. Courtesy Galerie Gregor Stalger, Zürich. Photo Isabelle Arthuis ©Nicolas Party.

La conservation des œuvres sur papier sensibles aux effets de la lumière fait qu’elles ne peuvent pas être exposées de façon permanente.
Au milieu de XXème siècle la technique du pastel à pratiquement disparu. A partir des années 1965 -1970, Pierre Risch, peintre, graveur, lithographe et sculpteur français, relance le pastel en organisant des expositions didactiques et conférences s’adressant à un large public et lance une nouvelle gamme de pastels secs. Au fil des années, le pastel suscite un bel engouement auprès d’une nouvelle génération d’artistes contemporains.
Au XXème, la puissance de ses pigments va conférer au pastel un rôle important dans l’autonomie de la couleur, et les recherches de l’abstraction (Augusto Giacometti, František Kupka, Paul Klee, Aurélie Nemours, Sean Scully). La sensualité de sa matière séduit les artistes minimalistes (Fred Sandback, Paul Mogensen, Robert Mangold) comme les tenants de la figuration (Sam Szafran, Tom Phillips). La flexibilité de ce médium très polysémique l’adapte désormais à tous les usages, et son ancrage classique fait de lui le partenaire idéal pour mettre à l’épreuve les codes de la représentation (Roni Horn, Nicolas Party).

Pastels du 16ème au 21ème siècle  – Jusqu’au 21 mai 2018

Fondation de l’Hermitage
Route du Signal 2  / 1018 Lausanne
Tél. +41 (0)21 320 50 01

www.fondation-hermitage.ch

Hermitage Lausanne pastels

George Segal - Jeune femme à la chaise, 1964. Pastel

Affiche Hermitage Lausanne Edouard Manet La Viennoise Irma Brunner,

 

George Segal – Jeune femme à la chaise, 1964. Pastel sur papier brun. Grafische Sammlung, Kunsthaus ZürichPhoto Kunsthaus Zürich © The George and Helen Segal Foundation / 2018, ProLitteris, Zurich // Edouard Manet La Viennoise Irma Brunner, 1880- 1882. Pastel sur toile. Coll. Privée. Photo Dominic Büttner.

 

 

 

 

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