La nouvelle exposition du Musée Ariana “Théières en goguette. Naissance et évolution d’un art de vivre” met en lumière la collection de théières exceptionnelle conservée par le musée. La présentation offre l’occasion de découvrir l’évolution de cet objet fascinant durant 500 ans, tant au niveau formel que stylistique ou décoratif. A admirer jusqu’au 13 septembre 2020.
« On boit le thé pour oublier le bruit du monde. » Lu Yu (733-804), maître de thé sous la dynastie Tang (618-907)
L’histoire des théières est intimement liée à l’art de consommer le thé. Selon les époques, les feuilles de thé sont traitées différemment. On distingue trois périodes :
L’âge du thé bouilli – Sous la dynastie des Tang (618-907), le thé est bouilli. Les feuilles récoltées sont passées à la vapeur avant d’être concassées en fines particules et compressées dans des moules de formes variées, afin d’obtenir de petites briques ou gâteaux de thé. Ces briques deviennent rapidement une monnaie d’échange et peuvent avoir des formes (boule, disque, brique…), des valeurs et des poids divers. Certaines sont ornées d’inscriptions comme des idéogrammes ou des motifs traditionnels, en relief. Lors de la consommation du thé, les briques de thé sont mises à rôtir afin d’éliminer les insectes, avant d’être moulues puis tamisées et bouillies avec du sel et agrémentées de divers ingrédients comme du gingembre, des épices, du lait ou des oignons. Le thé obtenu est servi dans des bols en grès à l’aide d’une louche. Cette manière de consommer le thé est encore pratiquée au Tibet et en Mongolie où il est mélangé avec du sel et du beurre de yak.
L’âge du thé battu – Sous la dynastie des Song (960-1279), le thé est battu. Grâce à une meule, les feuilles sont réduites en fine poudre, qui est émulsionnée avec un fouet de bambou dans l’eau chaude afin d’obtenir une mousse onctueuse. À cette époque, le thé se généralise en Chine pour devenir une boisson nationale. Les amateurs organisent des rencontres amicales de dégustation, des concours, et les potiers créent des bols en céramique, pour mieux le savourer.
Au même moment, le thé et les premiers théiers sont implantés au Japon. La consommation du thé entrera progressivement dans les habitudes de la population nippone. Actuellement, cette technique de préparation est toujours utilisée pour la cérémonie du thé Chanoyu.
L’âge du thé infusé – En 1391, sous la dynastie des Ming (1368-1644), un décret de l’empereur Hongwu impose un retour à la simplicité. L’impôt est désormais payé non plus sous forme de brique de thé mais de feuilles. Les feuilles de thé séchées et torréfiées sont désormais infusées dans l’eau chaude. Cette nouvelle manière de préparer le thé engendre un nouvel ustensile : la théière, rendant obsolètes les ustensiles utilisés auparavant comme la meule, le tamis, le fouet ou la louche. Dès le 17e siècle, les Européens découvrent cette nouvelle boisson exotique, le thé infusé.
La naissance d’une forme
Née au début du 16ème siècle en Chine, la théière est un récipient destiné à infuser les feuilles de thé et à servir le thé. Elle va connaître une diffusion fulgurante et parvenir en Europe par le biais des grandes Compagnies des Indes orientales. Plus qu’un simple objet utilitaire bien connu aujourd’hui, la théière témoigne d’un art de vivre qui se développe autour de la consommation du thé. Cette boisson exotique se propagera dans toutes les couches sociales au cours des siècles. Aujourd’hui, les théières sont réalisées dans divers matériaux comme le grès, la terre cuite, la porcelaine, la faïence,le verre, la fonte, l’étain ou l’argent… Composée d’un corps, d’un goulot, d’une anse et d’un couvercle, chaque théière a ses caractéristiques. L’évocation de cette forme et de son histoire permet de découvrir la richesse des collections du musée dont la diversité des styles, des décors ou des éléments rajoutés sont révélateurs d’une mode en perpétuelle évolution.
Certains historiens pensent qu’elle dérive des bouilloires en céramique, ou des verseuses à alcool en bronze chinois. Ces verseuses, utilisées pour les boissons fermentées sous l’époque Shang (1570-1045 av. J.-C.), possèdent les différents éléments constitutifs de la théière (corps, anse, goulot et couvercle) mais comptent généralement trois ou quatre pieds.
Appel à vos sens !
Outre la vue, l’odorat et le goût sont sollicités, sens rarement conviés dans les musées !
Visites commentées les dimanches : 23 juin à 14h ; 13 octobre 2019 à 11h 19 janvier, 17 mars, 13 septembre 2020 à 11h. Gratuit, sans inscription.
Théières en goguette. Naissance et évolution d’un art de vivre
Musée Ariana Genève / Avenue de la Paix 10 / 1202 Genève
Jusqu’au 13 septembre 2020
www.ariana-geneve.ch