Regard sur l’exposition Dans la forêt- Zurich
Regard sur l’exposition © Musée national suisse

Exploitation. Destruction. Protection. Au cours des derniers siècles, notre rapport à la forêt a profondément évolué. Une nouvelle exposition au Musée national Zurich montre à quel point cette évolution a influencé la culture, mais aussi l’art et la littérature. A voir jusqu’au 17 juillet 2022.

Bruno Manser et Along Sega
Bruno Manser et Along Sega, porte-parole et chef des Penan.
Photo: Erik Pauser, 1999
Gran Chaco, Paraguay
L'artiste Osvaldo Pitoe
Art provenant du Gran Chaco, Paraguay
L’artiste Osvaldo Pitoe nous rappelle l’importance de la forêt, aujourd’hui gravement menacée par la déforestation.

Osvaldo Pitoe, senza titolo, 2015. 
Collection Artes Vivas, Verena Regehr Gerber

 

Exploitée par l’être humain depuis des siècles, la forêt est progressivement détruite par l’industrialisation croissante depuis le XIXe siècle. Et avec elle disparait une grande partie de la faune et de la flore. Cependant, certains s’y sont intéressés au-delà de son aspect économique. Des personnes comme Paul Sarasin (1856-1929), naturaliste et cofondateur du Parc National Suisse, se sont engagées en faveur de la protection de la nature et ont peu à peu suscité un changement de mentalité dans certains pans de la population. 

Le rejet de l’exploitation effrénée des ressources naturelles et la prise de conscience progressive de la nécessité de les utiliser avec parcimonie marquèrent le début de la protection de l’environnement. Mais ce «voyage» ne peut s’arrêter aux frontières d’un pays, comme le montre par exemple l’engagement radical de Bruno Manser : parti à Bornéo dans les années 1980 pour lutter contre le déboisement de la forêt équatoriale avec les tribus nomades qui la peuplent, au final, l’a payé de sa vie. Ses journaux abondamment illustrés, que l’on peut voir dans l’exposition, sont un témoignage verbal et graphique de cette expérience.

glissement de terrain village de Someo, dans le Val Maggia
En 1924, un glissement de terrain détruit une partie du village de Someo, dans le Val Maggia. Les glissements de terrain, fréquents dans le Tessin, résultent du déboisement de grandes étendues de forêts de protection, réalisé au XIXe siècle pour le commerce du bois. Photo: Anton Krenn, 1924, ETH-Bibliothek Zürich, Bildarchiv, Hs_1360-0173-002
installation vidéo de Julian Charrière Ever Since We Crawled Zurich
Un arbre après l’autre tombe au sol dans un craquement. L’installation vidéo de Julian Charrière Ever Since We Crawled Out résume ainsi la situation : Peut-on encore sauver la forêt ? Ou le dernier arbre va-t-il bientôt être abattu ? ©Julian Charrière, 2022, ProLitteris, Zurich / VG Bild-Kunst, Bonn, Germany
 
école forestière de l’EPF de Zurich f 1866
L’école forestière de l’EPF de Zurich forme
des spécialistes pour qu’ils protègent les forêts.
Photo: diplômés et professeurs, 1866.
Photo: Archiv Eidg. Forschungsanstalt WSL,

Bildarchiv Knuchel-ETH, 1892-1952
Caspar Wolf Romantische Waldlandschaft mit drei Figuren
Les sapins déracinés symbolisent la puissance primordiale de la nature et les forces qui l’animent. Dans son atelier, Caspar Wolf confère une dimension théâtrale à cette forêt originelle. Caspar Wolf (1735–1783), Romantische Waldlandschaft mit drei Figuren, die eine Felszunge besteigen, 1769. Aargauer Kunsthaus Aarau, Depositum der Koch-Berner-Stiftung, Photo: Jörg Müller
Ramasseuse de feuilles mortes,  Ernest Biéler
Des siècles durant, le bétail est nourri avec des feuilles mortes, qui servent aussi de litières dans les étables ou de matériau de remplissage pour les paillasses des personnes démunies. Ernest Biéler (1863–1948), Ramasseuse de feuilles mortes, s.d. [ca. 1909], gouache, aquarelle et crayon sur papier marouflé sur carton, 47 x 57,9 cm.. Musée d’art du Valais, Sion, inv. BA 2201 ©Musées cantonaux du Valais, Sion. Michel Martinez
Le bûcheron de Ferdinand Hodler
Le bûcheron de Ferdinand Hodler symbolise la force et la résistance. Cet homme héroïque qui domestique la nature deviendra lui-même sa plus grande menace. Ferdinand Hodler (1853–1918), Der Holzfäller, 1910, Huile sur toile, 129.5 x 100 cm. 
Kunstsammlung der Schweizerischen Mobiliar Genossenschaft

Notre rapport ancestral à la forêt se reflète aussi dans de nombreuses œuvres artistiques et littéraires. Or ce lien a continuellement évolué. Tandis qu’à l’époque du romantisme, artistes et auteurs voyaient dans la forêt un refuge et un lieu où se ressourcer dans un monde en constante accélération, la modernité la représenta de manière hautement stylisée afin de la sublimer sous une forme esthétique extrêmement épurée.

Dans l’art du XXème siècle, la thématique de la forêt a pris de plus en plus la valeur d’un manifeste politique contre la destruction de l’environnement. Cette idée fondamentale se manifeste encore aujourd’hui. Les représentations inspirées du romantisme sont plus présentes que jamais et tendent à refaire de la forêt un lieu de contemplation, de tranquillité et de détente. Comme à cette époque, nous vivons dans une société où tout va trop vite et où de plus en plus d’individus sont en quête d’un havre de paix.

Regard sur l’exposition Forêt Zurich
Regard sur l’exposition Forêt Zurich avec arbre de Rondinone
Regard sur l’exposition sur la Forêt Zurich

Affiche Im Wald Zurich 2022
D’autres œuvres d’artistes contemporains, comme Guido Baselgia, Denise Bertschi, Julian Charrière, Franz Gertsch, Shirana Shahbazi ou Thomas Struth, montrent que nous pouvons percevoir aujourd’hui la forêt comme une entité globale. CI-dessus, l’affiche de l’exposition.

Une sculpture d’arbre d’Ugo Rondinone constitue le point final de l’exposition et représente bien plus qu’un avertissement solennel contre le changement climatique. Dans la cour intérieure du musée, le public pourra en outre s’asseoir dans l’«arène pour l’arbre» et méditer sur l’avenir de la forêt.
Au centre de cette œuvre de Klaus Littmann se trouve un arbre sans feuillage qui invite spectatrices et spectateurs à réfléchir à leur rapport à la forêt.


Musée national Zurich. Museumstrasse 2, 8021 Zurich
Tél. +41 44 218 65 11

Du 18 mars au 17 juillet 2022.

www.landesmuseum.ch 

l'arbre-sculpture d’Ugo Rondinone,
La sculpture d’Ugo Rondinone, qui a pris pour modèle un olivier vieux de 2000 ans en Italie du Sud, sonne comme un mauvais présage annonçant le changement climatique. Ugo Rondinone (*1964), 2007, fonte d’aluminium laquée de blanc. Collection Maja Hoffmann / Luma Foundation, Photo: Enzo Velo

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