La commémoration des 160 ans de l’ouverture des relations diplomatiques entre la Suisse et le Japon donne lieu à une série d’activités
dont la conférence donnée à la Fondation Baur par Laure Schwartz-Arenales, directrice de ce bel établissement qui recevait
le 24 septembre Setsuko Klossowska de Rola, peintre, écrivaine et céramiste.

Setsuko Klossowska de Rola et Laure Schwartz-Arenales
Setsuko Klossowska de Rola et Laure Schwartz-Arenales (fk)

« Nous allons voyager dans le temps… Et revenir sur l’histoire extraordinaire des différentes cultures entre le Japon et la Suisse. La jeunesse de Setsuko Ideta Klossowska de Rola, sa rencontre avec le peintre Balthus, les années européennes, et son installation en Suisse », annonce Laure Schwartz-Arenales aux nombreux auditeurs.
Toute menue dans son kimono vert émeraude, Setsuko Ideta Klossowska de Rola évoque, avec finesse humour et une mémoire sans faille, sa jeunesse à Tokyo, dans un Japon d’après-guerre assoiffé de connaître l’Europe, l’Amérique…
La jeune étudiante est tournée vers les arts, menant également des études de piano et des cours de ballet classique.

Une grand’mère érudite, lui enseigne des poèmes datant du 7-8ème siècle, invitant voisins et musiciens pour la cérémonie du thé et des concerts improvisés; une mère qui lui inculque la passion de la lecture, l’importance des livres qui feront rêver la fillette d’alors. Pas de mariage arrangé mais un amour dramatique, digne d’une tragédie de Shakespeare… Voilà l’avenir souhaité et le mode de vie à auxquels aspire la jeune Setsuko.

La rencontre avec Balthazar Klossowska de Rola

Diplômée du lycée Morimura Gakuen de Tokyo, la jeune fille entre au département de langue française de l’université Sophia à Tokyo. De son côté Balthazar Klossowska de Rola, appelé Balthus, est mandaté en 1962 par André Malraux, ministre de la Culture en France, afin de préparer une grande exposition ayant pour thème l’Art japonais, au Petit-Palais à Paris. Directeur de l’Académie de France à Rome, vivant à la villa Médicis, Balthus est envoyé au Japon à la découverte des trésors des temples. Il y rencontre Setsuko, âgée de 20 ans, passionnée par la culture française. « Balthus parlait peu de son travail. Il a réveillé en moi quelque chose qui stagnait dans le brouillard. Cela s’est avéré comme une évidence : c’était un homme pour moi. N’ayant pas d’affinités artistiques avec de artistes tels que Picasso, Giacometti, j’ai découvert à la Villa Médicis, que beauté et sobriété étaient compatibles. Là-bas, les étudiants se promenaient toujours avec leurs cahiers de croquis. J’ai demandé à Balthus l’autorisation de peindre. Il était d’accord à condition que je ne fasse pas de peinture à l’huile… »

Découverte du Grand Chalet de Rossinière

« Il était conseillé à Balthus, atteint de paludisme, de profiter de l’air frais de la montagne. Nous nous sommes mis à la recherche d’une maison avec un grand atelier. A Rossinière, ce merveilleux petit village au côté très humain, le grand chalet tout en bois me rappelait les maisons du Japon. Après une visite à un ami qui y vivait, mon souhait était d’y habiter. Il régnait au salon une atmosphère à l’Agatha Christie… » Setsuko continue à peindre tout en servant de “garçon d’atelier” à son époux (ils se sont mariés en 1967, à Tokyo), mélangeant ses couleurs, nettoyant ses pinceaux…

La vie de Setsuko Klossowska de Rola se poursuit entre son atelier parisien, le Japon et la Suisse où elle vient se ressourcer

Le comte Klossowski de Rola décède en 2001, “ayant traversé sa vie comme dans un tableau invisible“, selon Setsuko qui continue de vivre au grand Chalet avec leur fille Harumi, née en 1973, se consacrant à son art exposé, entre autres, à Rome, New York, Paris, Londres et Tokyo, et entamant une vie dans un monde dont elle n’aurait jamais pensé faire partie un jour : organisation de conférences, écriture, créations… Son existence est partagée entre un atelier à Paris et la montagne suisse, souffle vital, diffuseur d’énergie. L’artiste est Présidente Honoraire de la Fondation Balthus.

L’artiste collabore avec le céramiste français Astier de Villatte, et crée des œuvres – céramique, bronze, peinture – qui font partie de collections renommées. « Je suis influencée par tout ce qui est beau. Il est bon de capturer ce qui va procurer des émotions, ce qui enrichit la vie…

Terre, nature, peinture, couleurs minérales… Des mots qu’apprécie Setsuko en préparation d’une exposition qui aura lieu à New York.

Patrimoine architectural, le Grand Chalet et ses 130 fenêtres
En face du chalet, l’atelier de Balthus et resté comme le peintre l’avait laissé

Voir aussi : Rossinière – L’atelier du peintre Balthus
https://www.fykmag.com/rossiniere-latelier-du-peintre-balthus/

Vous avez aimé cet article?