Franz Anton Bustelli L’espion à la fontaine groupe de porcelaine peinte Nymphenburg Piguet et Meylan , Montre à automate et musique vers 1820, Genève

Franz Anton Bustelli (d’après un modèle de), L’espion à la fontaine, vers 1756, groupe de porcelaine peinte, Nymphenburg. © Musée national suisse // Piguet et Meylan, Montre à automate et musique, or, émail, perles, laiton, poinçon FO dans un losange et No 8280 dans le fond du boîtier, vers 1820, Genève. © Musée international d’horlogerie, La-Chaux-de-Fonds.

 

Si de nos jours, la sexualité, frontale ou suggérée, est omniprésente dans le flux incessant des images véhiculées dans les médias et le business du divertissement, qu’en était-il au 18ème siècle ? A quels niveaux s’érigeaient les barrières de la censure, de l’acceptable et du punissable ? Avait-on le choix de son, sa ou ses partenaires ? Autant de questions auxquelles l’exposition Et plus si affinités… donne des réponses parfois surprenantes, toujours documentées. A découvrir jusqu’au 11.10.2020.

L’exposition met en avant les aspirations à plus de liberté et la quête de l’hédonisme mises en perspective avec l’affirmation de l’importance de l’amour conjugal, de l’enfant et de la famille. Elle propose un parcours allant de la rencontre à la naissance en questionnant le contrôle de la sexualité mais aussi les imaginaires galants et érotiques, les pratiques contraceptives. Ces sujets sont évoqués grâce à des objets de la vie quotidienne, parfois précieux et rares, et des documents inédits.

Casanova, Auguste Tissot, Goethe…

L’exposition convoque aussi plusieurs « experts » du 18ème siècle en matière de séduction, désir et sexualité. Parmi eux, Casanova qui entreprend en 1760 un voyage en Suisse au cours duquel il multiplie les expériences sexuelles, ou le célèbre médecin lausannois Samuel Auguste Tissot, auteur d’un non moins célèbre livre intitulé De l’onanisme, qui condamne la pratique de la masturbation. Dans Les affinités électives (Die Wahlverwandtschaften, 1809), Goethe, grand admirateur de Jean-Jacques Rousseau et précurseur du romantisme allemand, s’inspire des travaux de chimie du 18ème siècle pour décrire la proximité des cœurs et l’attraction magnétique des corps qui se font perturbatrices des conventions sociales.

A l’image des méandres du cœur et des replis les plus secrets du désir, une scénographie surprenante dévoile objets raffinés et quotidiens ou parfois coquins ainsi que des multimédias et interviews de spécialistes. L’exposition a été conçue autour de sept thématiques : La rencontre amoureuse : au premier regard, aux yeux de tous; La chair sous contrôle; Libre, libéré, libertin ?; Parlons mariage ! ; Mots d’amour : l’amour dans tous ses états; Masculin – féminin; L’enfant précieux.

 

Lit d’angle à baldaquin avec extension marqueterie couple enlacé Antoni Zanet

Lit d’angle à baldaquin marqueterie Antoni ZanetLit d’angle à baldaquin avec extension appartenant à Balthasar von Planta, 1650

Lit d’angle à baldaquin avec extension, pouvant se transformer en lit double, appartenant à Balthasar von Planta, 1650, bois sculpté et marqueteries. Suisse (GR). Antoni Zanet, spécialiste en marqueterie, a réalisé des personnages de la mythologie : Vénus, Cupidon, Diane… © Musée national suisse.

Rencontre, séduction, mariage…

Au 18ème siècle déjà, l’éveil au romantisme est caractérisé par de nombreux écrits et objets de la vie quotidien. Ces objets symbolisent l’amour, l’être aimé ou son souvenir. Pour la plupart innocents, une fois détournés de leur fonction première, ils s’avèrent moins ingénus. Les préoccupations s’articulent alors autour de la galanterie, de l’enfant désiré ou non.

Aux 16ème et 17ème siècles, Le protestantisme légitime la sexualité au sein du couple marié entre homme et femme, pendant que toutes autres formes de sexualité sont criminalisées. On pratique la Bible comme ligne de conduite et les Réformateurs obtiennent le soutien des magistrats et des pouvoirs publics. Ainsi est créée et instaurée la police des mœurs.

Le mariage est l’aboutissement d’une société très hiérarchique. On tend à se marier selon son choix, mais toujours dans le respect des volontés parentales et sans jamais sortir du rang. Le contrat de mariage permet de fixer la question de la dot, des biens des époux. Certaines jeunes filles aimeraient retarder l’âge du mariage qui était alors de 18 ans, un état auquel elles ne pouvaient pas échapper. L’objectif du mariage est d’assurer la descendance, avec une intention de réguler les naissances, notamment par le biais de la contraception. La grande encyclopédie suisse (Yverdon) indique que le mariage est l’union d’un homme et d’une femme destinée à la procréation. Pourtant, les enfants conçus hors mariage sont alors en augmentation en Suisse et en Europe. Pourtant au 18ème siècle, on commence à voir des époux qui sont vraiment amoureux l’un de l’autre.

scènes galantes sur éventails

Lettre d'amour sur papier découpé avec coeurs Découpage peint, sémoignage d’amour d’Elisabeth Wild, 1810,

Scènes galantes peintes sur éventails. //Lettre d’amour sur papier découpé avec coeurs // «Fidélité, sois mon dernier mot», témoignage d’amour d’Elisabeth Wild, 1810, Stäfa (ZH), découpage peint. © Musée national suisse

Désir, galanterie, libertinage

Face à la perte de vitesse de l’ordre religieux, voit le jour une grande liberté des mœurs. C’est le début du libertinage, symbolisé par l’usage d’objets érotiques ou galants. Il se développe un imaginaire représentant les relations idéales entre les deux sexes. L’esprit philosophique place la chair et le plaisir au cœur de la connaissance, prenant désormais en compte aussi les sens, le toucher et l’émotion. Le médecin lausannois Samuel Auguste Tissot, célèbre dans toute l’Europe, incarne une forme de sexualité bourgeoise prônant le plaisir modéré au sein du couple, sans perdre de vue sa finalité : la procréation. Dans le discours médical et non plus axé autour du péché, la masturbation est condamnée, car elle représente une perte d’énergie.

Retour de chez la nourrice exposition Prangins exposition Prangins tableau

La contraception, véritable révolution

Infatigable et controversé, Casanova est le plus célèbre homme à femmes de tous les temps. Peu friand du préservatif, ce grand jouisseur estime que l’homme, machine à plaisir, doit satisfaire sa partenaire à condition d’un acte sexuel complet. Ainsi, il fait fabriquer à Genève des boules d’or, une sorte de diaphragme qui serait un moyen de contraception. La pratique de la contraception ne se limite pas aux milieux libertins, le contrôle des naissances, par le moyen du coït interrompu, constitue au 18ème siècle, d’abord dans les régions protestantes, une véritable révolution sexuelle.

Lectures d’extraits érotiques

Dans le thème de l’exposition temporaire Et plus si affinités… Amour et sexualité au 18ème siècle, Jacques Roman, comédien, lira des extraits des Mémoires de Casanova pendant son voyage en Suisse. Textes érotiques. 3.9.2020 / 18:30 – 19:30  &  8.10.2020 / 18:30 – 19:30

Toujours dans le thème de l’exposition, Nathalie Pfeiffer, comédienne, lira des extraits des extraits sulfureux de La Belle et la Bête30.9.2020 / 18:30 – 19:30

Affiche Et plus si affinités... Prangins

Catelle de poêle : scène galante et escarpolette, faience peinteLudwig Georg Vogel (1788-1879), Joyeuse compagnie dans une taverne

 

 

Et plus si affinités…
Amour et sexualité au 18ème siècle

Jusqu’au 11.10.2020

Musée national suisse  // Château de Prangins  Avenue du Général Guiguer // 31197 Prangins
Tél. : +41 (0) 22 994 88 90

www.chateaudeprangins.ch
Visuels ci-dessus : Affiche Exposition temporaire Et plus si affinités… Amour et sexualité au 18e siècle. © Musée national suisse // Salomon Freudweiler (céramiste) d’après Johann Jakob I ou II Kuhn, Catelle de poêle : scène galante et escarpolette, 2e moitié 18e siècle (?), faïence peinte. Zurich. © Musée national suisse // Ludwig Georg Vogel (1788-1879), Joyeuse compagnie dans une taverne, 19e siècle, dessin à la plume et lavis, Zurich. 

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