Pour fêter le 85ème anniversaire de Tomi Ungerer, plus de 85 artistes de France et d’ailleurs ont taillé leurs crayons pour illustrer les liens que leur œuvre entretient avec celle de leur aîné. C’est une réelle « leçon graphique » qui s’exerce dans tous les domaines du dessin, de l’illustration pour la jeunesse, du dessin publicitaire, satirique, érotique, à la bande dessinée et au dessin de presse.
Achdé (Hervé Darmenton, dit), « Wanted Apocalypse Joe », 2016 @Achdé
Blake, Blechman, Cestac, Geluck, Hoppmann, Lemaître, Loustal, Meurisse, Mordillo, Plantu, Plonk & Replonk, Solotareff, Swarte, Willem, et beaucoup d’autres encore, ont répondu présents avec des parodies, des détournements ou encore des hommages graphiques. Aux créations réalisées spécialement pour l’occasion se sont ajoutées 15 œuvres « historiques » provenant de collections publiques et privées. Visible sur deux niveaux du musée, l’exposition qui réunit environ 150 œuvres, met en regard celles de Tomi Ungerer avec celles des artistes qu’il a inspiré.
L’exposition « Tomi Ungerer Forever + de 85 artistes pour ses 85 ans » est à admirer sans modération jusqu’au 19 mars 2017 à Strasbourg, au Musée Tomi Ungerer – Centre international de l’illustration. L’idée de cette exposition est le fruit d’une collaboration entre le Musée Tomi Ungerer — Centre international de l’Illustration et l’École de Condé à Paris.
Véritable pôle de l’Illustration
Traversée par le développement de la gravure et de la lithographie, l’histoire de cet art, encore trop souvent considéré comme mineur, est dominée par la monumentale figure de Gustave Doré, natif de la ville. Aux XXe et XXIe siècles, c’est celle de Tomi Ungerer, également né à Strasbourg, qui en prend incontestablement le relais.
Ce musée situé quelques minutes de la Cathédrale de Strasbourg, dans un environnement architectural exceptionnel, datant de la fin du XIXème siècle, conserve la collection Tomi Ungerer, qui provient de plusieurs donations effectuées par l’artiste à sa ville natale depuis 1975 et qui comprend onze mille dessins originaux, des estampes, un fonds documentaire, une bibliothèque. Six mille cinq cents jouets et jeux provenant de la collection personnelle de Tomi Ungerer font également partie de la collection du musée.
Joost Swarte, sans titre, 2016 – Rémi Courgeon, sans titre, 2016 – Philippe Dupuy, « Ungerer Power/ Drawing Power », 2015
Parcours de l’exposition
« Un portrait de Tomi Ungerer » – Pour dresser un portrait de Tomi Ungerer, les artistes ont eu recours à plusieurs procédés. Ils ont mis en avant tantôt son activité d’artiste tantôt l’aspect satirique de son oeuvre Certains ont détourné des éléments de sa vie personnelle comme sa date de naissance, son prénom, ses lieux de séjour favoris ou sa passion pour les jouets. Ils ont aussi relevé certaines thématiques de son oeuvre, comme la mort.
« Le livre pour enfants » – Les livres pour enfants de Tomi Ungerer et notamment son livre-culte Les Trois Brigands (1961) constituent pour les artistes un riche vivier d’inspirations. Ils assimilent l’auteur à ses héros, en réécrivent l’histoire ou en prélèvent des détails. Mellops et Crictor tout comme Jean de la Lune, Le Géant de Zeralda, La grosse Bête de Monsieur Racine, Pas de baiser pour Maman ou encore Tomi Ungerers Märchenbuch ont laissé leurs marques chez d’autres. Sa collection de jouets mécaniques en a inspirés certains .
« L’art de l’affiche » – La créativité de Tomi Ungerer dans ce domaine est immense. Des maquettes de projets publicitaires non aboutis des années 1950, des affiches des années 1960 à New York comme celle pour la course de chevaux « Acqueduct Raceway », les travaux pour l’agence de publicité Pütz à Cologne dans les années 1975-80, une affiche sur les relations franco-allemandes ont tour à tour inspiré les artistes.
« Le dessin satirique, de société et politique » – Depuis ses années new-yorkaises, le dessin satirique de société est incontestablement au cœur de la production graphique de Tomi Ungerer. The Underground Sketchbook, The Party, America, ont été des références précises pour certains artistes. Ses thèmes de prédilection comme la mort, le couple, l’animal humanisé, la métamorphose, se retrouvent chez d’autres. La puissance de sa satire politique, comme dans « Black Power/White Power », a également marqué.
« Le dessin d’observation » – Le dessin d’observation est à la base de toute activité graphique et Tomi Ungerer n’a cessé de le pratiquer depuis sa jeunesse. Paradoxalement c’est aussi l’aspect de son oeuvre qui est le moins connu. Certains artistes se sont souvenus de la force graphique des esquisses montrant des animaux familiers et des dessins dans Slow Agony, oeuvres réalisées pendant la période canadienne.
« Le dessin érotique » – Le dessin érotique est une facette importante de l’oeuvre de Tomi Ungerer, où il apparaît soit en filigrane soit en un genre défini comme tel. Fornicon et Totempole qui mettent en avant des pratiques mécanisées et sado-masochistes figurent parmi les inspirations majeures tout comme Le Kamasutra des Grenouilles avec son bestiaire coquin . Le motif central de son oeuvre érotique, la femme, le reste également pour certains artistes
Martin Jarrie, sans titre, 2016 – Grégoire Solotareff, « Mon nom est Tiffany », 2015
Tomi Ungerer illustrateur, auteur et militant
Né en 1931 à Strasbourg, Jean-Thomas, dit Tomi, Ungerer s’est forgé une renommée mondiale avec ses dessins et ses gouaches., et se définit lui-même «caméléoniste».
Promu officier de la Légion d’honneur en 2001, nommé docteur honoris causa de l’Université de Karlsruhe en 2004, chevalier des Palmes académiques, puis commandeur de l’Ordre national du Mérite en 2013. Cet artiste universel vit en Irlande mais garde des contacts très étroits avec l’Alsace et ses souvenirs d’enfance, égayés par Max et Moritz, Samivel et Benjamin Rabier, illuminés par le retable de Grünewald de Colmar devant lequel le jeune artiste restait des heures durant à rêver. On ne compte plus ses récompenses, comme le grand prix national des Arts graphiques décerné en France par le Ministère de la Culture; le prix Hans Christian Andersen – Nobel du livre pour la jeunesse – remis en 1998 pour l’ensemble de son oeuvre dans ce domaine; le prix Erich-Kästner, décerné par le Conseil de l’Europe, en 2003…
Vue de la villa Greiner / Escalier intérieur du musée avec l’avion Lindberg
Exposition « Tomi Ungerer Forever + de 85 artistes pour ses 85 ans » jusqu’au 19 mars 2017
Musée Tomi Ungerer – Centre international de l’Illustration
2, av. de la Marseillaise / 67 000 STRASBOURG
@Photos : Musées de la Ville de Strasbourg // Photos Tomi Ungerer : Françoyse Krier