La nouvelle grande exposition temporaire du Musée Ariana Meissen • Folies de porcelaine propose, jusqu’au 6 septembre 2020, une plongée dans la grande aventure que fut la découverte, en Europe, de la porcelaine. Mille ans après la Chine, le premier objet créé dans ce matériau précieux voit le jour, à Meissen (Allemagne), au début du 18ème siècle.
Multiples aventures, rocambolesques et romanesques
Les pièces exceptionnelles exposées sont issues de huit collections privées suisses. Révéler la richesse du patrimoine privé, souvent conservé à l’abri des regards, tel est l’enjeu de ce projet pour lequel plusieurs collectionneurs ont accepté de confier au Musée Ariana une partie de leur extraordinaire collection. Par la mise en lumière de ces pièces d’exception, c’est toute l’histoire de la porcelaine des débuts de la manufacture de Meissen révélé ici au public. On y apprend comment par passion, convoitise ou opportunisme, des hommes se sont lancés dans la quête d’un graal, la découverte de la porcelaine, véritable or blanc, au risque d’y perdre leur fortune et parfois même leur raison.
La passion, moteur des collectionneurs
La plupart des collectionneurs ont porté leur regard sur des thématiques et des groupes précis créés à la manufacture de Meissen : tel amateur s’est concentré sur la figure du carlin, tel autre sur les chinoiseries, tel autre encore sur le Service Brühlsches Allerlei. La passion est toujours un moteur pour la création de telles collections. Elle l’est pour tous et le fut en particulier pour Pierre Darier (1945-2018), à qui est dédiée l’exposition, qui s’est intéressé pleinement au monde de Meissen à travers l’acquisition de pièces de choix du Service aux cygnes.
Le projet a non seulement bénéficié du concours de collectionneurs privés mais également de celui de deux musées suisses : le Musée historique de Bâle et le Musée historique de Berne. Le premier conserve, notamment, la collection réunie par Hans Rudolf Christen (1924-2011) qui s’est concentré sur les pièces de services, tasses, théières, soucoupes, assiettes aux inspirations diverses. Le Musée de Berne quant à lui a reçu en legs l’ensemble réuni par Albert Kocher (1872-1941) contenant les différents pans de la production de Meissen : figurines, services, vases…
Les protagonistes du succès de la manufacture
Meissen, petite ville fortifiée sur les bords de l’Elbe, a vu se jouer l’une des plus grandes aventures artistiques du monde occidental : la découverte de la porcelaine. Ardemment désirée par les souverains de l’époque, convoitée par l’ensemble de la noblesse, la porcelaine chinoise est l’objet de toutes les attentions. Bien qu’onéreuse, les élites se l’arrachent.
Au début du 18ème siècle, mille ans après la Chine, c’est à Meissen que l’on parvient enfin à percer le secret de ce précieux matériau translucide, immaculé, doté d’une aura sans pareille. Auguste II, Johann Friedrich Böttger, Johann Gregorius Höroldt et Johann Joachim Kändler sont les principaux personnages clés de cette aventure…
Le souverain : Auguste le For (1670-1733), prince-électeur de Saxe et roi de Pologne, commence dès 1700 à collectionner la porcelaine asiatique et aspire à la création, sur son sol, de cet « or blanc ». Son but est d’assouvir sa « maladie » de porcelaine, en vue de renforcer son prestige personnel mais également afin que les investissements se fassent désormais au cœur de son royaume.
L’alchimiste et le savant : Johann Friedrich Böttger (1682-1719) prétend avoir trouvé le secret de la pierre philosophale (transformation de métaux en or). Il est alors recherché par Frédéric Ier de Prusse (1657-1713) et Auguste le Fort qui y voient un intérêt financier évident, le capturent et l’emprisonnent. L’alchimiste ne doit sa survie qu’à Walter von Tschirnhaus (1651-1708), savant et conseiller du prince-électeur, qui a l’idée ingénieuse d’orienter les recherches vers la découverte de la porcelaine. S’ensuivront des années de labeur, entre Dresde et Meissen. En 1708, Böttger parvient à imiter le grès rouge chinois, puis découvre l’arcane tant convoitée. En janvier 1710, Auguste le Fort annonce la création, à Meissen, de la première manufacture européenne de porcelaine.
Le décorateur : Johann Gregorius Höroldt (1696-1775), peintre actif à Strasbourg puis à Vienne, est considéré comme le fondateur de la décoration peinte de la porcelaine de Meissen. Les premiers décors, influencés par les modèles asiatiques, sont suivis par les fameuses Chinoiseries qui connaîtront un succès fulgurant. Suivront ensuite des motifs européens, paysages, scènes de chasse, marines, pastorales ou galanteries « à la Watteau ».
Le modeleur : Johann Joachim Kändler (1706-1775), maître modeleur à la manufacture, sculpteur de formation bénéficiant d’un goût prononcé pour la nature, est à l’origine du développement de la statuaire à Meissen. Sous ses doigts, tout un monde fabuleux surgit. L’esprit baroque – théâtral, inventif, luxueux – s’impose de façon magistrale à la manufacture.
Musée Ariana // Musée suisse de la céramique et du verre // Avenue de la Paix 10 // 1202 Genève
Tél.: +41(0)22 418 54 50
Jusqu’au 6 septembre 2020 – Ouvert du mardi au dimanche de 10 à 18 heures, fermé le lundi